En peinture, je trouve que le plus dur, c’est de savoir dire STOP, tout y est. C’est assez paradoxal.
Il y a comme un point furtif,.. un moment où si l’on va plus loin, on perd l’instant. On perd ce qui est. On perd – je ne sais pas comment le dire – … on perd la révélation. Révélation au sens premier : ce qui devient évident et suffisant à soi même.
J’en ai fait les frais déjà plusieurs fois dans ma très petite expérience : le besoin de peindre, motivé par une frustration profonde, frénétique pour expulser ce que l’on a en soit… est difficile à tempérer. Ce moment .. ce STOP, je suis rassasié, tout y est .. est difficile à identifier.
Pour faire une analogie malheureuse, c’est comme au McDo. On commande, on mange vite car c’est bourré d’exhausteur de goût, et on a encore faim après coût alors que la dose de kcal est déjà largement excédentaire par rapport à nos appétits… On a été trop vite. On n’a pas pris le temps de voir ce moment où finalement, nous étions satisfaits et rassasiés.
Alors, j’ai des exemples…. trop d’ailleurs.. 😉
Aller, prenons 1 des mes premiers tableaux.
Il s’agit de la 3ieme version du tableau original. La plus nulle de mon point de vue. Pourquoi ?
Parce que je suis trop parti dans les détails. A vouloir répondre aux questions de ceux qui voyaient les versions précédentes, j’ai voulu accentuer ce qui était suggéré. J’ai ajouté: la couleur, la chair, le buste squelettique, l’esquisse de reflet sur une table suggérée rouge sang… bref.. trop de détails, trop évident.
Moi je m’y retrouve pas. J’ai perdu le sens premier de mon expression. Allons voir la version juste avant ( la 2)
Sur cette version 2, moins détaillée, on retrouve néanmoins les points clefs :
- la décomposition, symbolisant le temps et ses effets
- la tête entre les mains qui symbolise bien l’expression ‘prise de tête’ de l’Homme dans ses pensées ou ses ruminations stériles.
- tout est noir autour… à peine une clarté dans le coin gauche qui appel à un sursaut… mais c’est déjà bien tard.
Personnellement, je trouve que cette version est plus énigmatique et donc positionne l’observateur dans le questionnement… et donc possiblement aussi dans l’inaction. Va t’il lui aussi partir dans ses propres ruminations en voyant ce tableau?
J’aime mieux. Et pourtant j’ai cédé à la tentation de forcer le message dans la version 3… personnellement, je considère que c’est une erreur. Je préfère la 2. Mais allons voir la version initiale….
Alors là, il faut saisir que cette 1iere version est le fruit de 10′ de peinture au couteau.
C’est brutal, mal dégrossi, noir et blanc..
On devine à peine ce que cela représente. Mais moi, j’y vois tout. Et j’y vois surtout ce qui ne se voit pas : la rage, la spontanéité, le gestion instinctif… de l’émotion pure sans artifice. Une oeuvre très dans l’esprit Bellovaci auquel je me réfère dans ce site.
Bref, c’est moi – dans mes heures sombres. Mon passager noir comme dirait Dexter. D’autre voit la marque de Mathieu Chedid (M). J’ai été vexé 😉 Il faut savoir accepter ce que donne en retour les observateurs…
Dommage, ce tableau version 1 n’existe plus. Il a été étouffé par des couches de conventions, de codes, de représentation… jusqu’à se perdre dans la symbolique creuse de notre 3ième version.
Bon, voila ce que j’avais à dire. Je ne prétends pas être un expert mais juste un être qui se cherche à travers sa peinture et partage ce cheminement.
Ce genre d’erreur ( ce que je considère comme erreur) – j’en ai fait d’autre. Et peut être que mon jugement est aussi dans l’erreur. Mais je ne peux m’empêcher de penser à Picasso peignant son taureau pour parvenir à une poignée de ligne après avoir dépouillé ses premières esquisses du superflu. Je n’avais pas compris à l’époque. Aujourd’hui, je sais.
ET vous ? Quelle version vous semble la mieux ? N’hésitez pas à laisser un commentaire pour préciser votre point de vue… et merci d’avance.